Insulte à notre profession Thread poster: Odette Grille (X)
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Odette Grille (X) Canada Local time: 19:36 English to French + ...
Ce matin sur Radio-Canada.Ca, on peut lire un article concernant Air Canada et cette phrase qui m'a fait bondir: "Air Canada soutient toutefois qu'il ne traduira pas en français, entre autres, les manuels d'entretien fournis par les avionneurs pour des raisons de sécurités, craignant des erreurs dues à une mauvaise interprétation. " Voilà où on en arrive avec des pseudo-traducteurs casseurs de prix, et des conditions de travail toujours plus médiocres ... Sous-... See more Ce matin sur Radio-Canada.Ca, on peut lire un article concernant Air Canada et cette phrase qui m'a fait bondir: "Air Canada soutient toutefois qu'il ne traduira pas en français, entre autres, les manuels d'entretien fournis par les avionneurs pour des raisons de sécurités, craignant des erreurs dues à une mauvaise interprétation. " Voilà où on en arrive avec des pseudo-traducteurs casseurs de prix, et des conditions de travail toujours plus médiocres ... Sous-paiement et urgence sont les deux mamelles de l'incompétence. Je ne suis pas traductrice technique, mais je connais le sérieux des traducteurs techniques et je me suis violemment indignée sur le forum des commentaires de Radio-Can. J'espère que d'autres en feront autant et surtout que les associations professionnelles exigeront un retrait de cette déclaration, comme nous devrions exiger que se retirent les pseudo-traducteurs qui cassent les prix et font passer leurs collègues pour des bons à rien. Voici le lien de l'article: http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Economie/2013/01/08/007-aircanada-francais-437plaintes.shtml?Authorized=1&AuthenticationKey=2_4_8f4f69b8-f41d-40a4-bd0f-f8c41d2c317d.pppjiachnckhnbaandjljfoedacjkbojanjpifeknilpmeehgnpplclpecfonbbcdjjlgkjbhmfeebeopfgkjnaogalgljifdeifkcbolpdeoamamijmjcnicmkpiagklfokkhmdfhpa (Je sais ce lien semble horriblement long, mais je l'ai essayé en faisant un copier-coller et il fonctionne) Bonne lecture et bonne journée. Ode ▲ Collapse | | |
Se plaindre de la qualité | Jan 9, 2013 |
Bonjour Odette, En fait, en affirmant cela, Air Canada avoue tout simplement faire appel à des traducteurs dont les compétences ne sont pas à la hauteur. Tout simplement. C'est à eux de mettre le prix et de donner un délai raisonnable comme vous dites pour que le travail soit effectué par une personne compétente dans le domaine avec le temps nécessaire pour la traduction et la relecture. | | |
Ce n'est pas si facile | Jan 9, 2013 |
Odette, dans ce cas, il ne s'agit pas de "pseudo-traducteurs casseurs de prix". Comme un pilote, un ingénieur et un traducteur technique avec 28 ans d’expérience professionnelle, je peux vous assurer que la situation ici est un peu spécifique. D’une part, dans les industries comme l’aviation, l’énergie nucléaire, la pharmacologie, etc., même pour le meilleur traducteur dans l’univers, la possibilité purement théorique d’erreurs dans la traduction est traitée par la règlemen... See more Odette, dans ce cas, il ne s'agit pas de "pseudo-traducteurs casseurs de prix". Comme un pilote, un ingénieur et un traducteur technique avec 28 ans d’expérience professionnelle, je peux vous assurer que la situation ici est un peu spécifique. D’une part, dans les industries comme l’aviation, l’énergie nucléaire, la pharmacologie, etc., même pour le meilleur traducteur dans l’univers, la possibilité purement théorique d’erreurs dans la traduction est traitée par la règlementation comme un risque à mitiger, nous forçant à rétroverser les traductions pour les contre-vérifier avec l’original, donc augmentant le prix au moins 2x. D’autre part, dans certains cas, même l’anglais commun n’est pas considéré suffisamment univoque pour les manuels d’entretien en aviation ; on utilise ASD Simplified Technical English (anciennement nommé AECMA Simplified English). En l'absence d'un équivalent dans autres langues, ça devient une solution unique à utiliser. Finalement, au niveau courant, c’est plus facile et moins cher d’enseigner le personnel d'entretien que de produire la documentation avec toutes les mesures d’assurance qualité selon la règlementation sectorielle. ▲ Collapse | | |
Odette Grille (X) Canada Local time: 19:36 English to French + ... TOPIC STARTER La confiance en notre profession | Jan 9, 2013 |
Anton Konashenok wrote: Odette, dans ce cas, il ne s'agit pas de "pseudo-traducteurs casseurs de prix". Comme un pilote, un ingénieur et un traducteur technique avec 28 ans d’expérience professionnelle, je peux vous assurer que la situation ici est un peu spécifique. D’une part, dans les industries comme l’aviation, l’énergie nucléaire, la pharmacologie, etc., même pour le meilleur traducteur dans l’univers, la possibilité purement théorique d’erreurs dans la traduction est traitée par la règlementation comme un risque à mitiger, nous forçant à rétroverser les traductions pour les contre-vérifier avec l’original, donc augmentant le prix au moins 2x. D’autre part, dans certains cas, même l’anglais commun n’est pas considéré suffisamment univoque pour les manuels d’entretien en aviation ; on utilise ASD Simplified Technical English (anciennement nommé AECMA Simplified English). En l'absence d'un équivalent dans autres langues, ça devient une solution unique à utiliser. Finalement, au niveau courant, c’est plus facile et moins cher d’enseigner le personnel d'entretien que de produire la documentation avec toutes les mesures d’assurance qualité selon la règlementation sectorielle. Il n'en reste pas moins, cher Anton, qu'on ne formera pas des techniciens plus vite en utilisant des manuels en anglais qu'ils ne comprennent pas. Et comme vous le faites justement remarquer, toutes les précautions sont prises dans ces domaines techniques, pour obtenir le meilleur résultat possible. En effet, même les textes en anglais sont trop souvent ambigus. L'erreur est humaine, mais nous faisons le maximum pour l'éviter. Accuser le risque d'une mauvaise interprétation est une fausse excuse (trop souvent entendue). Les mêmes formateurs qui dirigeront les employés à former devraient être capables de rectifier les possibles errements. Ma référence aux pseudo-traducteurs a trait au fait que trop de mauvaises traductions ont abouti à cette méfiance. | |
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Ma référence aux pseudo-traducteurs a trait au fait que trop de mauvaises traductions ont abouti à cette méfiance. Oui, c'est bien ça - et malheureusement, la plupart de nos clients sont indoctrinés qu’une telle chose comme une traduction fidèle et claire n’existe pas. | | |
Schtroumpf Local time: 01:36 German to French + ... Avant de râler... | Jan 10, 2013 |
Je ne comprends pas bien l'objet de ton indignation, Odette. Les manuels d'entretien des avions sont entièrement rédigés sous la responsabilité du constructeur. La moindre erreur toute bête, comme indiqué par Anton, peut avoir pour conséquence des dizaines ou centaines de morts (par exemple, en plaçant la virgule d'un couple de serrage crucial au mauvais endroit) si elle était vraiment suivie par le personnel (qui n'est pas bête non plus, mais parfois trop pressé par des impératifs o... See more Je ne comprends pas bien l'objet de ton indignation, Odette. Les manuels d'entretien des avions sont entièrement rédigés sous la responsabilité du constructeur. La moindre erreur toute bête, comme indiqué par Anton, peut avoir pour conséquence des dizaines ou centaines de morts (par exemple, en plaçant la virgule d'un couple de serrage crucial au mauvais endroit) si elle était vraiment suivie par le personnel (qui n'est pas bête non plus, mais parfois trop pressé par des impératifs opérationnels). La traduction des manuels d'entretien aéronautiques telle que je la connais et pratique est **également de la responsabilité du constructeur**, seul habilité à valider ce type de document. Il est donc normal à mes yeux qu'une compagnie aérienne ne veuille pas assurer la traduction et assumer des risques qui ne lui incombent pas. On se trouve en présence de différents impératifs linguistiques qui ne sont pas faciles à réconcilier entre eux. Le monde aéronautique a l'anglais comme langue de support quasi-universelle, on le sait, et seule une partie des documents de base en anglais seront traduits en d'autres langues en fonction des strictes besoins. C'est une question de coûts à mon avis, rien d'autre. En résumé, je ne vois absolument aucune insulte faite à notre profession dans cette citation. ▲ Collapse | | |
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Arnaud HERVE France Local time: 01:36 English to French + ... Spécialisation | Jan 11, 2013 |
Anton Konashenok wrote: Odette, dans ce cas, il ne s'agit pas de "pseudo-traducteurs casseurs de prix". Comme un pilote, un ingénieur et un traducteur technique avec 28 ans d’expérience professionnelle, je peux vous assurer que la situation ici est un peu spécifique. D’une part, dans les industries comme l’aviation, l’énergie nucléaire, la pharmacologie, etc., même pour le meilleur traducteur dans l’univers, la possibilité purement théorique d’erreurs dans la traduction est traitée par la règlementation comme un risque à mitiger, nous forçant à rétroverser les traductions pour les contre-vérifier avec l’original, donc augmentant le prix au moins 2x. D’autre part, dans certains cas, même l’anglais commun n’est pas considéré suffisamment univoque pour les manuels d’entretien en aviation ; on utilise ASD Simplified Technical English (anciennement nommé AECMA Simplified English). En l'absence d'un équivalent dans autres langues, ça devient une solution unique à utiliser. Finalement, au niveau courant, c’est plus facile et moins cher d’enseigner le personnel d'entretien que de produire la documentation avec toutes les mesures d’assurance qualité selon la règlementation sectorielle. Mais je pense que les différentes branches devraient s'organiser pour financer des traducteurs spécifiques. Parler de "traduction technique" ça n'a plus de sens à un certain niveau de spécialisation poussée. Même avec une formation d'ingénieur on ne peut pas être ingénieur en tout. Une fois j'ai splendidement raté une traduction sur le nettoyage des installations de cimenterie. On m'a dit "Votre travail est lamentable". Question : qui va me financer pour que je devienne spécialiste de la cimenterie ? Et qui va me payer pendant que j'attends une traduction dans la cimenterie ? Même chose pour l'aéronautique critique, les centrales énergétiques, etc. le client final veut que je sois expert immédiatement, et ne veux me financer que pour un boulot tous les quatre ans... C'est surtout flagrant quand on voit que les employés embauchés pour des tâches de base dans les établissements concernés reçoivent eux une formation adéquate... et payée. Donc je l'avoue, je n'ai que le niveau licence en sciences, je ne suis pas docteur en tout. | |
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Schtroumpf Local time: 01:36 German to French + ... @ Arnaud HERVE : être / devenir spécialiste en aéronautique... | Jan 12, 2013 |
Merci pour ta contribution, qui ne manque pas de franchise ! Arnaud HERVE wrote: Mais je pense que les différentes branches devraient s'organiser pour financer des traducteurs spécifiques. Parler de "traduction technique" ça n'a plus de sens à un certain niveau de spécialisation poussée. Même avec une formation d'ingénieur on ne peut pas être ingénieur en tout. Une fois j'ai splendidement raté une traduction sur le nettoyage des installations de cimenterie. On m'a dit "Votre travail est lamentable". Question : qui va me financer pour que je devienne spécialiste de la cimenterie ? Et qui va me payer pendant que j'attends une traduction dans la cimenterie ? Or, il faut bien situer le problème. Les traducteurs spécialisés en aéronautique, il y en a déjà. Nous sommes quelques douzaines, mais nous sommes également quelques dizaines à avoir déserté le créneau. Devine pourquoi ? Parce qu'on souhaite nous payer 10 centimes ou moins le mot pour une spécialisation pointue, acquise en des années de travail salarié ou freelance avec et chez les constructeurs. En clair, l'industrie aéronautique a externalisé la trad chez des prestataires, censés leur coûter moins cher que notre prestation en interne. Alors que cela ajoute un intermédiaire de plus. Résultat, les tarifs / salaires ressemblent à ceux proposés pour traduire des menus de restaurant. | | |
Odette Grille (X) Canada Local time: 19:36 English to French + ... TOPIC STARTER Insulte aux traducteurs techniques | Jan 15, 2013 |
Schtroumpf wrote: Je ne comprends pas bien l'objet de ton indignation, Odette. En résumé, je ne vois absolument aucune insulte faite à notre profession dans cette citation. Le sujet de mon indignation n'est pas qui doit traduire le manuel, mais le fait que Air Canada suggère que les traductions contiennent des erreurs d'interprétation. Crois-tu que former les techniciens francophones qui ne parlent pas anglais, à partir d'un manuel complètement rédigé dans cette langue soit moins risqué ? Les traducteurs techniques sont des gens très sérieux et leurs travaux, comme le souligne Anton, sont revus maintes fois. En outre, dans le doute, le formateur peut bien se référer au manuel anglais si ça lui chante, mais je maintiens qu'il n'y a aucune raison de supposer une erreur d'interprétation possible. Il y a bien des manières de s'assurer qu'il n'y ait aucune erreur. Les agences spécialisées en avionique existent. Là n'est pas le problème. C'est la supposition de l'incompétence qui est une insulte. Pour l'anecdote, j'interprétais à mes débuts, dans une conférence multilingues. Un malentendu s'est installé entre un anglophone et un germanophone. J'avais compris d'où provenait le malentendu (je maîtrisais encore bien l'allemand à l'époque), mais nous devions traduire ce que les participants se disaient et non rectifier leurs propos. Ils se sont enfoncés pendant dix minutes dans leur dialogue de sourds jusqu'à ce qu'un des participants accuse les interprètes. J'ai dû intervenir (c'est ma société qui était embauchée) et demander à expliquer au président, francophone, les méandres du malentendu. On accuse trop souvent les interprètes ou les traducteurs, alors que la faute provient du texte source ou de la formulation ambigüe. | |
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Odette Grille (X) Canada Local time: 19:36 English to French + ... TOPIC STARTER
Merci Madeleine, je crois que cela illustre parfaitement mon propos et j'ai bien ri. Bonne journée Ode | | |
Schtroumpf Local time: 01:36 German to French + ... Comme il vous plaira ! | Jan 15, 2013 |
Vous dites vous-même, Odette, ne pas être traductrice technique. Si vous voulez défendre la profession, c'est parfaitement honorable, j'approuve. C'est juste que l'exemple choisi n'est pas tellement bon ! La citation extraite de son contexte n'est pas une insulte, et je vous ai expliqué pourquoi : "Craignant des erreurs dues à une mauvaise interprétation" ne signifie ABSOLUMENT PAS que des erreurs aient déjà été commises. C'est peut-être juste pour dire "craignant... See more Vous dites vous-même, Odette, ne pas être traductrice technique. Si vous voulez défendre la profession, c'est parfaitement honorable, j'approuve. C'est juste que l'exemple choisi n'est pas tellement bon ! La citation extraite de son contexte n'est pas une insulte, et je vous ai expliqué pourquoi : "Craignant des erreurs dues à une mauvaise interprétation" ne signifie ABSOLUMENT PAS que des erreurs aient déjà été commises. C'est peut-être juste pour dire "craignant les risques d'erreur dus à une mauvaise interprétation". Il faut savoir que ce risque est indissociable de la traduction (même avec des traducteurs qualifiés !) et que la compagnie ne va pas l'assumer. Tout traducteur compétent sait que ce risque d'erreur existe. Au contraire, un traducteur qui prétendrait ne jamais commettre d'erreur sur une traduction est un "incompétent", par manque de conscience de ses limites. Bien qu'ayant traduit des milliers de pages de manuels aéronautiques, je persiste à vous assurer que la phrase d'Air Canada ne me froisse en rien. Comme quoi... Petite suggestion, si nous avons la fibre joueuse : on pourrait comparer nos traductions respectives de la petite phrase d'Air Canada, et on verra si nos traductions ne sont pas finalement... terriblement subjectives ! ▲ Collapse | | |
Odette Grille (X) Canada Local time: 19:36 English to French + ... TOPIC STARTER Autre exemple | Jan 15, 2013 |
Si je déclare publiquement : "Je ne vais pas chez le médecin car je crains qu'il ne me tue en faisant une erreur de diagnostic." Croyez-vous que l'Ordre des médecins ne s'en indignera pas ? Et pourtant ... Évidemment que l'erreur est toujours possible. D'ailleurs, en cas de poursuites, la référence est toujours le texte source. Vous écrivez : "... ne signifie ABSOLUMENT PAS que des erreurs aient déjà été commises" Qui a dit le contra... See more Si je déclare publiquement : "Je ne vais pas chez le médecin car je crains qu'il ne me tue en faisant une erreur de diagnostic." Croyez-vous que l'Ordre des médecins ne s'en indignera pas ? Et pourtant ... Évidemment que l'erreur est toujours possible. D'ailleurs, en cas de poursuites, la référence est toujours le texte source. Vous écrivez : "... ne signifie ABSOLUMENT PAS que des erreurs aient déjà été commises" Qui a dit le contraire ? C'est bien pourquoi la supposition est insultante, et une très mauvaise excuse quand il s'agit de former des employés unilingues francophones car il me semble que le risque de mauvaise interprétation est autrement plus grand, mais c'est un autre sujet. ▲ Collapse | | |